Qui a inventé le Monopoly ?

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Qui n’a pas joué à ce célèbre jeu dans ses jeunes années, nous initiant à l’investissement, aux rentes, à la banqueroute ?
Et pourtant, bien loin de vanter les mérites du capitalisme, il a été créé pour le dénoncer. Et ce jeu est l’oeuvre originale… d’une femme.

Elle s’appelait Elizabeth Magie et a vécu une vie peu commune.

Sténographe et secrétaire, elle aimait la poésie et s’adonnait à l’écriture de nouvelles et l’interprétation de sketchs dans son temps libre.

Intéressée par l’économie, elle s’était ralliée au mouvement quaker et appréciait particulièrement les travaux de l’économiste Henri George. Ce dernier avait comme objectif de taxer les propriétaires terriens d’un impôt unique, afin de limiter leurs pouvoirs. Dans sa jeunesse, Elizabeth avait lu son livre « Progress and Poverty » (Progrès et Pauvreté).

Les théories de George lui ont donné l’idée d’un jeu, sur lequel elle a travaillé sans cesse.
En 1903, après avoir enregistré un brevet pour protéger son concept, elle a lancé le Landlord’s Game, qu’on pourrait traduire par « le jeu du propriétaire terrien ».
Ce jeu était bien plus qu’un jeu, une satire. Elle utilisait le concept pour affirmer ses opinions politiques anti-monopoliste. A l’époque, ses « adversaires » s’appelaient Andrew Carnegie (ayant développé l’industrie de l’acier aux Etats-Unis) ou John D. Rockfeller (magnat du pétrole).
Il faut savoir que le mouvement anti-monopoliste était à l’avant garde des droits de la femme, ce qui devait sans doute attirer Elizabeth.

Il y avait 2 versions du jeu : une « anti-monopoliste », et une « monopoliste ». C’est la seconde qui a tout de suite le plus attiré l’attention. Dans cette version, l’enjeu est de créer des monopoles et détruire ses concurrents. Pour Elizabeth, le duo devait montrer l’intérêt supérieur de la version « anti-monopoliste ».

Le succès resta confidentiel. Le jeu se diffusa dans les milieux quaker, notamment universitaires… jusqu’à arriver dans les mains de Charles Darrow.

Charles Darrow était un ingénieur au chômage, ayant subi comme tant d’autres la crise de 1929. Il vit dans la version monopoliste du Landlord’s Game un excellent concept de jeu à vendre. Il s’en est alors fortement inspiré, a retravaillé la table de jeu et déposé à son tour un brevet, sous le nom de Monopoly.
Il le proposa à l’éditeur Parker qui le refusa, listant 52 défauts de conception.
Darrow se mit à le vendre, avec un tel succès que Parker revint à lui au bout de quelques années.
En vendant ses droits à Parker, Charles Darrow fit la culbute et devint le premier créateur de jeu millionnaire.

Quant à Elizabeth Magie, elle gagna dans l’affaire 500 dollars. Elle n’était pas intéressée par l’argent mais par le message véhiculé par le jeu, même amputé de la version « anti-monopoliste ».

Bien sûr, elle en voulait beaucoup à Darrow de lui avoir piqué son idée, de l’avoir surtout détourné de son objet premier,

Et pour autant, elle avait des problèmes d’argent. Pour dénoncer le fait que la femme était souvent réduite au mariage pour survivre, elle publia une annonce où elle se vendait au plus offrant.
Plus tard, elle finit par se marier avec un riche homme d’affaires, et mourut sans avoir d’enfants.

Son nom a été effacé de la mémoire collective jusqu’à réapparaître à la surface à l’occasion d’une bataille judiciaire entre Parker et un professeur d’économie, qui avait créé, comble de l’histoire, un anti-Monopoly.

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